lundi 2 juillet 2012

COUPABLE

Pendant que les uns s’inquiètent,
Que les autres s’alarment,
Que d’autres encore s’émeuvent,
Nous nous comptons nos morts
Livrés à leurs propres sorts
Sans abris, les survivants dorment…

L’Union Européenne dit suivre avec préoccupation
La situation sécuritaire et humanitaire
Qui va de dégradation en dégradation
Mais elle ne peut rien y faire
Sauf peut-être toutes ces déclarations…
De bonnes intentions !

Combien de morts faut-il encore ?
Combien de viols, des sans foyers,
Des âmes errantes, des endeuillés,
Des affamés, des déplacés, des réfugiés ?
Qu’attendons-nous comme signal fort ?

Dans la sécurité de leurs bureaux
Ils diffusent toute sorte de communiqués
Dans la sécurité de mon bureau
Insignifiante, ne faisant que tourniquer
Je n’ose pas faire entendre ma voix
Et je laisse ceux qui tuent dicter leur loi !

Je me dis que je n’ai aucun choix
Que je ne peux pas faire bouger les choses
Je ne peux que prier et croiser les doigts
Et sous mon humeur morose
Je n’ose pas me redresser cette fois
Une fois encore, une fois de trop,
Je ravale ma peine et mes mots…

Pourtant je n’ai que ma révolte, ma colère,
Mon amertume, mon impuissance,
Mon mal qui me marque comme un fer
Mes larmes, ma peur, ma souffrance…

Dans la sécurité de ma maison
Je fais comme eux, je ne fais qu’écrire
Pendant que la douleur tel un poison
Me laisse, à petit feux, mourir…
Eux, de leurs communiqués font large diffusion
Moi, je suis la seule à me lire…

Pourtant ô combien je souffre
Quand nos morts comptent pour rien
Cette spirale qui nous engouffre
Aura-t-elle un jour une fin ?
Ce combat devrait être mien
Mais lâchement je baisse les mains !

Lâchement, je baisse les yeux
Tournant le dos aux malheureux
Lâchement, j’appelle à l’aide
Et ici COUPABLE, je plaide…

Coupable de n’avoir rien fait
Coupable d’avoir tourné le dos
A mes compatriotes congolais
Qui croulaient sous tous ces maux
Coupable d’avoir refusé de croire
Que je pouvais aussi agir
Coupable d’avoir refusé de voir
Que ne rien faire était trahir
Coupable d’avoir accepté
Sans rien dire, sans un mot
Que mes frères soient tués
Que mes sœurs soient violées
Dans un combat qui n’est pas le leur
Coupable d’avoir eu peur
Coupable d’avoir ravalé mes mots…



Poème de Kingli,
Kinshasa 26 juin 2012, 15h50

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